Deux plaisirs différents

Court Metrage Autobiographique 2022 14

Mon plus long film

Hier soir, j’ai fini mon plus long court métrage. Il dure 15 minutes. Images tournées en Bourgogne du 4 au 8 août – il y a deux mois environ. J’ai plutôt pour habitude de réaliser un film en une ou deux semaines. Cette fois, j’ai laissé mûrir. N’y ai pas touché quand je n’avais pas envie. J’ai travaillé sur d’autres films déjà bien avancés, j’ai eu mes vacances à Paris, durant lesquelles approcher mon ordinateur soulevait une puissante répugnance. J’ai pris mon temps. Juste un peu forcé sur la fin peut-être : j’ai travaillé aux ultimes corrections en perdant patience. J’avais trop hâte d’éprouver cette satisfaction très particulière : finir. Terminer. Achever.

La sensation manquante

Cette sensation des deux mains qui tiennent un objet en main : il est entier, il est forme, il est autonome, il existe. Je me rappelle cette même impression avec une chanson qui trouve son dernier accord, son pont, son mot manquant. Ça y est : toi et moi, c’est fini, j’ai terminé mon ouvrage, tu es, je te lance dans le monde, vis ta vie. Comme d’avoir dans la paume un caillou rond et doux, parfaitement lisse : on ne veut rien y ajouter, rien retirer. Et justement, c’est la question avec laquelle je reste : elle m’a manqué cette satisfaction. J’ai eu plusieurs fois la nostalgie de mes films à la semaine. Quelle émulation! quelle euphorie! de pouvoir chaque semaine donner naissance à une histoire finie et la partager aussitôt!

Qu’est-ce que j’y gagne ?

Me vient aussi cette question: est-ce que ça m’a apporté quelque chose en plus, de prendre mon temps, de me fier au rythme de l’inspiration ?
De le douceur sans doute. Je n’ai, sauf à la toute fin, pas une seule fois travaillé dans la tension ou l’inconfort. J’ai aimé la lenteur, l’absence de pression, la possibilité de ne m’en occuper que quand j’en avais vraiment envie. Il était hors de question que je m’y attaque en étant pressé de finir. Et cette douceur je compte bien la cultiver sur tous mes projets.
Je dois reconnaître que la maturation lente a permis l’éclosion d’idées, de trouvailles, d’une justesse entre l’objet fini et mon souhait.
L’émotion hier soir, quand j’ai pu le préparer à la publication : elle me semblait intensifiée par l’investissement de temps, de soin, de réflexion, d’attention. J’avais l’impression de tenir plus à ce film qu’à d’autres, qu’il représentait plus de choses. – Bon, ce n’est pas négligeable d’éprouver ça, et pas familier. (En sachant que ça peut n’avoir aucune répercussion sur l’estime portée à mon travail.)
Je me suis confronté à un exercice que je ne maîtrise pas, et je suis arrivé au bout. Sans trop savoir ce que j’ai appris – mais sans doute quelque chose autour de « comment raconter une histoire » sur quinze minutes, qui est différent de la création d’une bulle poétique de 3 minutes (beaucoup plus simple et naturel pour moi).
Un autre point non négligeable: quand je montre quelque chose qui m’a coûté des efforts monumentaux, un tas d’enjeux prennent des dimensions disproportionnées: l’attente de validation, le potentiel de frustration, le besoin de récompense, la peur de présenter… tout ça devient central et ne fait que diminuer encore les marges de plaisir. Donc là, j’ai gagné en légèreté durant la phase créative, mais aussi au moment de la publication. Une pauvreté de retours me touchera évidemment, mais elle n’aura pas ce goût bien connu du “tout ça pour ça”…

Deux plaisirs: possible ?

Du coup, je me demande s’il serait possible d’allier ces deux artisanats. J’ai le montage du film de Paris qui m’attend, qui pourrait bien s’avérer plus long, et me demander bien plus de patience encore – est-ce que j’arriverais en parallèle à créer d’autres histoires plus courtes, plus simples, pour jongler entre les deux plaisirs ? Celui de l’excitation immédiate, du travail brut, des croquis, et celui du tableau de longue haleine ? Sans perdre le plaisir des deux aires ? J’aimerais ça. Je ne peux faire qu’une seule chose : essayer.


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Artiste polymorphe suisse

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