Cahier.
Café.
Bureau tiré vers la lumière.
Souvenir des Allobroges.
Souvenir de moi.
Souvenir du Vague des airs.
Ne rien penser. Aller droit au soleil.
Marcher à côté du ruisseau de notes, comme sur un fil au bord d’une vaste mer, couverte de bleu, opaque et calme.
Silence et écriture.
Cette épure-là.
Rien de plus qu’une feuille et une plume.
Et cette musique une fois enregistrée quelque part sur un autre continent, diffusée comme par magie dans le ciel.
Un monde technique caché, invisible, qui me laisse croire que je me passe complètement de lui. Que je ne suis plus rien qu’un être qui respire, voit et pense.
La page est une feuille trouvée sous un arbre.
La plume m’a été léguée par un oiseau.
Et l’encre n’est qu’un pigment humide, puisé au pistil d’une grande fleur.
Je respire. Je n’ai rien. J’ai tout.
Est-ce un mirage derrière moi, cette bande miroitante où je me vois tel que je crois avoir été, profondément et attentivement émerveillé?
Commencer le jour par une conscience. C’était mon aspiration. Célébrer le mystère et le miracle d’être là. Premier geste. Et ça me faisait écrire des choses que je n’écris plus, me faisait penser et sentir des choses que je ne pense et ne sens plus.
Une fois cela fait, je pouvais me rendre au monde. J’avais fait le plein. J’étais prêt. J’étais du moins d’accord. J’avais même parfois envie, même parfois besoin, de sortir de l’étrangeté totale pour les satisfactions de faire, de rencontrer, de me coltiner le réel.
